Ski de raid dans les Carpates Ukrainiennes
Le 18 mars dernier, 12 français arrivant de Paris ou Genève et 2 italiens arrivant de Milan avec mon ami guide Alberto Re, se retrouvent à Lviv, capitale de la Galice, province occidentale de
l'Ukraine, proche de la Pologne. Nous sommes accueillis par mon ami Alexey Shustrov, avec lequel j'ai déjà voyagé, en particulier en Péninsule de Kola. Nous prenons immédiatement la route vers le
Sud, pour aller dormir à Ivano Frankivsk, capitale de la province des Carpates.
Dès le lendemain matin, nous partons dans les montagnes, à travers vallées et villages. Les Carpates sont peu élevées, 2000 mètres en moyenne, mais abondamment pourvues en neige et le climat est
très continental. L'ambiance est tout à fait russe, petites maisons, souvent de bois, nombreuses églises dressant leurs bulbes au milieu de cimetières, grandes forêts de résineux... Nous allons
rejoindre une petite station de ski, Dragobat. Accès invraisemblable : une piste de 15 km, dans la neige et la glace, avec des ornières énormes, accessible uniquement en 4x4, pas des 4x4 de frime
genre Porche Cayenne, mais de gros engins ex-militaires jonglant avec les difficultés et mettant malgré tout une bonne heure pour parvenir à la station, à 1300 m. Et effectivement des hôtels, des
gites, à droite à gauche, des remontées, téléskis, télésièges, qui s'entrecroisent d'une façon toute anarchique. Et des skieurs... Comment font-ils pour arriver, par le seul accès que nous avons
emprunté, c’est un mystère ? Bref, nous posons nos affaires, sautons sur nos skis pour une belle balade vers un sommet voisin. Et, au retour, quelques pistes, car les remontées ferment tard.
Ensuite, un bon repas ukrainien, bortsch bien entendu, chaque soir différent et délicieux, et quelques bonnes viandes, surtout de porc.
Pour monter à Dragobat
Arrivée à Dragobat, petite montée dans l'après-midi.
Le jour suivant, après le petit déjeuner classique de ces régions, charcuterie, fromage, pommes de terre, cornichons, nous repartons vers les hauteurs, pour une succession de sommets qui se
terminent au Bliznitsa (1883 m). Le temps est splendide et la vue porte au loin sur toute la chaîne des Carpates. De là une longue descente en versant Est permet de rejoindre la route du fond de
vallée, vers 700 m. La fin est assez pourrie, il faut le dire. Un 4x4 transportant nos affaires est là, plus un bus qui nous amène jusqu'au village de Tatariv, en faisant un crochet pour voir la
station de Boukovel, en pleine expansion, avec ses 60 km de pistes. Installation dans un charmant hôtel, où nous allons passer 4 nuits.
Vers le Bliznitsa
Réveil à 6 heures. Notre objectif est le Hoverla, point culminant du massif, avec ses 2061mètres. À bord de nos deux gros véhicules nous devons, après une assez bonne route, prendre à nouveau une
piste totalement défoncée où l'on croit se planter à chaque moment. Mais la mécanique russe triomphe de tout et nous parvenons au gros chalet de Zarosliak, à 1260 m. C'est là que nous
aurions dû passer 4 nuits, mais le chalet avait été retenu par des fédérations sportives, grâce au ciel et au sport, ouf ! Nous sommes si bien à Tatariv ! Départ classique à travers la forêt,
dont nous émergeons vers 1500 m, avant d'attaquer les pentes dénudées qui mènent vers le sommet. Toujours grand beau, mais vent froid. Le Hoverla est gravi par presque tout le groupe et nous
rivalisons d'imagination pour choisir la meilleure pente pour descendre...
Il est vraiment exaltant d'avoir devant soi un immense domaine sans une seule trace et de pouvoir skier là où l'inspiration nous pousse. Neige de printemps absolument féerique. Et même dans les
bois la neige porte encore, le bonheur. Retour à Tatariv, en faisant une longue halte dans un bar local, où la bière et le vin chaud coulent à flot, autour d'un grand feu central.
Départ vers le Hoverla
Sommet du Hoverla 2061 m.
Descente du Hoverla
Dans une taverne
Le 22 nous repartons à Zarosliak. Un départ différent nous fait partir vers l'Est et gravir le Pojijevska (1822m), où je m'arrête avec quelques-uns, tandis que les autres continuent avec Alexey
jusqu'au Brejkul (1912 m). Nous nous retrouvons pour la descente, aussi belle que la veille. Un groupe de 4, emmené par Alberto, a voulu continuer jusqu'au Hoverla de la veille que nous
retrouverons à Zorosliak. Descente, autre bistrot et bonne soirée à Tatariv.
Montée au Breskul
Le lendemain nous partons pour le Petros (2020 m), dans un autre massif, où nos 4x4 nous posent, avec difficultés à 900 m. Longue route forestière, avec peu de dénivelé (140 m en 1 heure !), mais
dans un pays magnifique avec ses chalets d'alpage de carte postale. Il fait toujours beau, sans vent, l'idéal. La route est longue jusqu'au sommet, mais la descente superbe. On nous dit que c'est
la première fois que ce sommet est gravi en ski de randonnée. Les locaux y montent parfois, mais à pied en portant leurs skis. D'ailleurs on voit quelques traces. Aucune de raquette, qui n'a pas
encore pénétré les Carpates d'Ukraine, c'est étrange. Retour un peu pénalisé par un contrôle de police qui sanctionne notre chauffeur Vassili, car il n'a apparemment pas la licence pour
transporter des passagers. Longue attente pour une lourde amende, que nous lui rembourserons. Arrêt bistrot bien sûr, avec de somptueuses chachliks et soirée bien arrosée pour fêter notre dernier
jour de ski.
La piste pour le Petros
Petros, alpages et montée.
Le sommet du Petros
Le lendemain est consacré à la remontée vers le Nord, visitant longuement Ivano Frankivsk, que nous n’avions qu’entrevu à l’aller, puis faisant un bon détour pour découvrir la ville de Butchetch.
Arrivée le soir à Lviv où nous nous installons dans un hôtel grand luxe avant d’aller célébrer notre voyage dans un bon restaurant.
Les trois guides, Alexey, Alberto
et Claude
Le dernier jour est un dimanche, et nous montons à la cathédrale St Georges, bourrée à craquer. Dès le début de l’office un chœur magnifique s’élève, pour ne plus s’arrêter. Dans toutes les églises de Lviv, il en est ainsi qu’elles soient grecques catholiques, orthodoxes ou ukrainiennes, et c’est avec émotion que nous franchirons les portails de toutes celles qui seront sur notre route. Notre guide, la belle Svetlana, nous fait découvrir sa ville dans un excellent français, avec de la passion et beaucoup d’humour. Lviv est une ville étonnante, classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Brûlée à la fin du Moyen Âge, elle a été entièrement reconstruite à la Renaissance et à la période baroque et forme un ensemble architectural superbe, qui m’a beaucoup fait penser à Prague. Mais il faut s’en arracher et, en début d’après-midi, nous nous rendons à l’aéroport, pour Vienne où le groupe se sépare pour Paris, Genève et Milan, tous heureux de la découverte de ces montagnes originales. Ne pas voir un randonneur, ni même un seul touriste étranger, en huit jours, skier sur de la neige sans traces, est un plaisir très rare, que nous avons tous apprécié.
Une spécialité, le Tchinaki.
Lviv, cathédrale St Georges. Lviv, une façade
Merci à Alexey qui, l’été dernier, à la terrasse de « Chez Mélanie », a su me convaincre qu’il me fallait absolument découvrir les montagnes d'Ukraine.
Claude Jaccoux, guide de haute montagne.
Découvrir, les voyages Compagnie.
Le ski de raid dans le blog.